Chers lecteurs,
Voici donc venu le temps d’une nouvelle ère, terme un peu prétentieux pour ne signaler que nous entamons une nouvelle année. C’est pourtant ainsi que chacun semble le percevoir, il se dit qu’il va faire mieux sur l’année à venir, que tout va être différent et que la réussite va lui sourire encore plus que l’année précédente. Et que celui qui clame ne pas l’avoir dit ou pensé, doit tout au moins reconnaître qu’il en a eu le sentiment, ne serait-ce que dans l’heure qui suit les 12 coups de minuits.
Certains diront que les vœux de bonheur et prospérité ne font partie que des règles de bienséance, mais nous savons tous que le soir du 31 décembre, lorsque nous souhaitons la bonne année, c’est à nos proches et bons amis que nous le faisons et qu’il y a assurément de la sincérité à cette minute-là.
Notre Ami du Nouvel An (nous l’appellerons ainsi) vous souhaitera donc que cette nouvelle année sera bonne par les opportunités qu’elle apportera, par les nouvelles rencontres qu’elle pourra procurer et les envies qu’elle pourra susciter. Notre Ami du Nouvel An est un être chaleureux, plein d’emphase et riche en émotions. Il risque de vous sauter au cou, sans même vous demander la permission, au risque de reverser le verre de champagne qu’il tenait dans la main (mais il parait que cela ne tache pas). Il saura (ou pas mais sans le faire exprès) vous accompagner jusqu’au bout de la nuit de la Saint Sylvestre pour un moment excessif de liesse, en musique, danses improvisées et débordements bienveillants.
C’est souvent à partir du 1er que la réalité refait surface pour Notre Ami du Nouvel An. Certains se disent que leurs grands discours de vœux seront heureusement oubliés par leur public. D’autres n’ont même plus besoins d’oublier ou de faire oublier leurs bonnes résolutions car ils n’ont tout bonnement même pas réussi à les exprimer à cause d’une langue trop bien imbibée. C’est ce 1er janvier, le « bonne année » commence à perdre de sa splendeur, perdre tout autant ses majuscules que l’emphase qui le portait la veille. Il est à noter que l’intention de Notre Ami du Nouvel An est toujours présente (et c’est tant mieux) mais il ne sait pas combien de temps il aura encore de l’énergie pour tout ça…
C’est sur les quelques jours suivants que tout se gâte pour Notre Ami du Nouvel An. Le retour au travail a presque fait disparaître le « bonne et heureuse année » et il commence à être remplacé par un « bonjour, bonne année » ou un « merci, à toi aussi ». Nous pourrions presque imaginer que les bonjours de cette période portent un nœud papillon encore bien fatigué par un retour au boulot un peu trop rapide.
La semaine suivante est la tueuse de vœux, par excellence. C’est un peu comme si Notre Ami du Nouvel An avait décrété qu’il était interdit de présenter quoique ce soit, à partir du 7 janvier… Lorsqu’un retardataire s’ose, il est vite rembarré par ses interlocuteurs qui lui répondent avec lassitude et enchaine sur la réunion de travail. Chacun a déjà zappé ses résolutions de l’année… normal avec tout ce travail qui n’a pas été fait avec les collègues qui n’avaient pourtant pas pris de congés. La bonne année commence donc suffisamment mal pour se la faire souhaiter !!
Quant aux 2 dernières semaines de janvier, Notre Ami du Nouvel An sera prêt à sauter à la gorge du premier collègue qui tentera de lui souhaiter des vœux. Nul ne sera épargné car ce n’est plus le lieu et encore moins le temps pour faire ça. C’est ringard, inutile et nous avons du travail qui nous attend ! Alors, enchainons !!
Notre Ami du Nouvel An n’est pour autant pas si désabusé que ça… Il a même quelques scrupules vis-à-vis de sa famille éloignée qu’il n’a pas encore appelée ou à qui il n’a pas envoyé de message électronique. Alors dans un relent de nostalgie et se remettant dans l’état d’esprit de la fin d’année, il va prendre LA carte de vœux. Vous savez celle qui restait au fond d’un tiroir, celle qui a les paillettes qui commencent à se barrer et qui reste kitch et belle avec ses 2 rênes tirant un traineau de l’UNICEF ? Ouais… vous la voyez maintenant…
Là où certains Amis du Nouvel An ne prendront que quelques minutes, d’autres déchireront leurs cartes avec rage et détermination en se disant qu’ils attendront de recevoir une carte pour potentiellement y répondre. Rassurez-vous, nous avons aussi des Amis du Nouvel An, beaucoup plus assidus, avec des liasses énormes de cartes de vœux, qui vont y passer des heures. Ils sauront trouver une petite phrase originale et différente pour chacun des vieux cousins, tantes et oncles. Et leurs cartes sont aussi belles que le stylo-plume qu’il prendront pour écrire !
La durée de vie d’une carte de vœux sera tellement courte entre son trajet de l’enveloppe à la poubelle en passant par une brève phase de lecture, que les découragés vous diront qu’ils ont optimisé le rapport temps/encre et qu’il en est bien ainsi.
Alors que dire de nos Amis du Nouvel An ?
Que, grâce à eux, nous aurons toujours le droit à autant d’amour et tendresse pour le proche que nous sommes, une sincère accolade pour leurs collègues et que, même si cela ne dure pas longtemps, c’est tellement plaisant de les avoir près de nous.
Nous pourrions aussi ajouter que nous sommes tous l’Ami du Nouvel An de quelqu’un et que nous avons hâte que la prochaine Saint Sylvestre pointe son nez pour à nouveau nous lâcher, comme la tradition en vœux ainsi !
Alexis
P.S. Je profite de cette vision amusée d’un protocole adoré, malmené et parfois vite oublié pour vous présenter mes meilleurs vœux pour 2024.